Sylvie Durbec,
En résidence à la Maison de la Poésie de Rennes

jeudi 29 novembre 2012

Des qui dont j'aime que j'aime

Des qui me disent: ça y est? Tu pars plus?
Des qui me demandent: ça va?
Des qui dont j'aime que j'aime.

Evidemment, j'ai une maison.
Evidemment, le vent souffle.
Evidemment, je mets de la ponctuation.

pop up F.R.


Le bonzom donne la main au zoizeau.
Il y a des mézanges ce matin.
Et un ciel qui durbinette serré.
C'est-à-dire le vent.
Alors gris, alors soleil, alors au travail.
Mais non. Dois apporter à ma voisine caramels salés.
Porte close, retour aux bonzoms, coquilles, carnets du fils.
En a apporté beaucoup, dos cousu collé, chutes de livres.


Du travail, au travail, fais quoi? fais rien.
Bruits de la maison reconnus. Rien à voir avec ceux de Beauséjour.
Difficile à penser, ça, être ici et en même temps dans la pièce où écrivait le heimatlos.
Ou n'écrivait pas. Ou rêvassait aux décombres d'un monde ancien.
Menuiserie Guitton: ne fabriquerait-on plus d'étagères et bibliothécaires qu'en Ikéanie?
De toute manière, les livres, pfuittt...n'en ont plus besoin les gens.
D'ailleurs c'est comme écrire. Ta voisine, elle lit tes livres?

Je dois aller la voir pour lui donner des caramels bretons et payer le moulin à huile.

Dans mon village, des qui disent en parlant de SD, c'est la dame qui écrit.
Simple. Comme la neige et le vent en hiver. Papier blanc, encre et le tour est joué.
Le chien retrouvé ronfle. Le chaton tente d'attraper le soleil. Il ne sait pas encore de quoi est fait un reflet. Nous mangeons sur des sets de table où est écrit en grandes lettres MIDI MINUIT POESIE.
Il y a des reflets à cause qu'ils sont plastifiés et que la lumière est allumée, à cause qu'il fait sombre. L'ont été à Rennes, pas très loin de la place Hoche et de l'école des Beaux-Arts. Ces 4 sets de table informent mes enfants et nos visiteurs.
( Les informent surtout de ma vanité).
On ne sait pas ( moi en l'occurrence, amis d'autres aussi) ce qui pousse quelqu'un d'à peu près sensé à faire ce genre de geste: donner à plastifier un set de table en papier que les organisateurs du festival de Nantes avaient distribué aux restaurateurs et hôtels de la ville et ensuite en recouvrir la table commune, de sorte que tous ceux qui passent par là, se mettent à parler, non pas de poésie et surtout pas de la mienne, mais de l'aéroport de Notre Dame des Landes, sur lequel j'avoue ne pas avoir d'avis personnel.
Un avis collectif plutôt.



Je suis en résidence chez moi. Enfermée. Le jardin est en bataille. Aucune mer à l'horizon. La colline tangue comme un bateau en perdition. Moi aussi?
C'est un peu étrange après Beauséjour d'être à ce point entourée de Bretagne.
Nathalie Guen avait commencé le travail et le voilà qui se poursuit avec le vent et les coquilles St Jacques.
L'odeur du sel ronge les murs de la maison. Il faut faire du feu. Brûler les mauvais souvenirs à chaque retour de l'hiver.
Peu de feuilles aux arbres. Dans la boîte aux lettres, peut-être. Il faut que je sorte voir ma voisine au joli nom d'Incarnacion. Tout parle l'étranger ici. Même les provençaux qui croient parler français. Et utilisent sans s'en douter des tournures étrangères à la langue française, par exemple, ils ont le rhume et vont au docteur.
Mais ils continuent à soutenir le Front National.
Moi, c'est les bonzoms qui me soutiennent avec leurs drôles de sexe, leurs drôles de lignes de vie.
Plus je lis les poètes (ce matin, un peu de M.C.Bancquart, Josyane de Jésus-Bergey, dans l'anthologie Pas d'ici pas d'ailleurs), plus je m'interroge sur cette fichue idée de patrie portative. Les bonzoms, je l'espère, vont m'apporter des réponses. J'ai même mis ce matin un peu d'or sur l'un d'eux et je crois qu'il en a été singulièrement content. Et les bonzoms sont nés en Bretagne, je ne saurais l'oublier; peut-être d'une indirecte filiation (cocasse?) de ce Jean-Claude féminin que F.B m'a montré et qui depuis se balade dans ma chanson.

bonzom du soir

Robert Walser dirait, arrivé à ce point de la promenade:
poursuivons.
Et je m'en vais le suivre.






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